Quel est la prescription applicable au recel successoral ? Comment calculer la prescription ?
7 points sur la prescription en matière de recel successoral
Source image : site Nioumi Avocats
La victime du recel successoral doit être vigilante eu égard aux règles de prescription. Conformément au droit commun l’action en recel successoral doit être exercée pendant un délai de cinq ans à compter de l’ouverture de la succession ou du décès du de cujus.
En outre, toute action en recel successorale exercée après partage amiable ou judiciaire sera déclarée irrecevable par le tribunal.
7 points à savoir sur la prescription en matière de recel successoral :
- Remarques préliminaires
- Point de départ du délai de prescription de l’action en recel successoral
- Recel successoral et délai de prescription de cinq ans ou trente ans en fonction de la date d’ouverture de la succession
- Charge de la preuve de l’acquisition du de la prescription
- Irrecevabilité de l’action en recel successoral après partage
- Prescription des intérêts en cas de non rapport des sommes à la succession
- Prescription de l’action devant une juridiction pénale
***
1- Remarques préliminaires sur le recel successoral
L’action en recel successoral : objet et demandeur à l’action
L’action en recel successoral peut être exercée par l’héritier réservataire tel qu’un enfant ou un conjoint survivant lésé. Elle peut également être exercée par un tiers désigné successible par le défunt dans un testament. Ce testament pourrait prévoir une ou plusieurs libéralités au profit d’une personne, ou même le désigner légataire universel, auquel cas il ne bénéficiera que de la quotité disponible pour ne pas empiéter sur la réserve légale de certains héritiers protégés par la loi française.
L’acte de recel successoral
Le recel de succession désigne l’acte par lequel une personne dissimule volontairement un bien ou une donation réalisée par le défunt à son profit.
2- Point de départ du délai de prescription de l’action en recel successoral
Quel est le point de départ de la prescription de l’action en en rapport de libéralités ? L’ouverture de la succession ? Le jour où a eu lieu la libéralité, à savoir l’acte de détournement d’héritage (exemple : le jour du virement, du retrait d’espèces, d’établissement du chèque, etc.) ? Ou le jour où le demandeur à l’action en a eu connaissance ? Cette question est délicate, notamment en cas de dissimulation de l’acte frauduleux.
Principe
Conformément au droit commun, la date de l’ouverture de la succession devrait être en principe retenue comme point de départ du délai de l’action en recel d’héritage.
Atténuation
Par exception, certains tribunaux ont pu retenir dans certains cas la date du décès du de cujus, dans le cas où le défendeur à l’action en recel successoral serait en mesure de démontrer que l’héritier demandeur avait connaissance de l’acte incriminé au moment du décès du de cujus. Ladite preuve peut être rapportée par tout moyen (attestations, etc.).
3- Recel successoral et délai de prescription de cinq ans ou trente ans en fonction de la date d’ouverture de la succession
La question de la prescription en matière d’action en recel de succession fait l’objet d’un contentieux important et complexe, dans la mesure où le droit des successions prévoit plusieurs délais de prescription (délais raccourcis pour l’action en réduction de libéralité, dix ans pour les cas prévus à l’article 780 du code civil …), et qu’une loi de 2006 est venue réformer les délais applicables en matière civile.
Après le 17 juin 2008
Pour les successions ouvertes après le 17 juin 2008, l’action en recel d’héritage est soumise à une prescription de 5 ans. L’article 2224 du code civil prévoit en effet que les créances et actions personnelles se prescrivent par cinq ans.
Avant le 17 juin 2008
Pour les successions ouvertes avant le 17 juin 2008, l’action en recel successoral est soumise à une prescription de 30 ans.
Néanmoins, la loi du 23 juin 2006 portant réforme de la prescription étant d’application immédiate, la prescription de 5 ans s’applique immédiatement lorsque l’action en recel n’est pas prescrite au 17 juin 2008. Aussi, cette application immédiate du délai de 5 ans ne peut avoir pour effet de rallonger le délai de prescription au-delà de 30 ans.
Exemple 1 :
Si la succession est ouverte en 1979, l’action en recel de succession se prescrit en 2009.
Exemple 2 :
SI la succession est ouverte en 2005, l’action ayant pour but de réparer le préjudice subi du fait du détournement d’héritage se prescrit le 16 juin 2013, et non en 2035.
4- Charge de la preuve de l’acquisition du de la prescription
Il convient de préciser ici que c’est à celui qui se prévaut de l’acquisition de la prescription de l’action en recel successoral de le démontrer, et donc de déterminer son point de départ (voir notamment : CA Aix-en-Provence, 19-02-2020, n° 17/12946).
5- Irrecevabilité de l’action en recel successoral après partage
L’action ayant pour objet de rapporter à l’actif successoral une libéralité qui aurait bénéficié à un héritier ou un tiers doit être formée avant que le partage de la succession ait lieu. Cela parait évident, à moins que le demandeur n’ait pu connaître les faits permettant d’exercer l’action.
Pourtant, de nombreuses actions en recel de succession sont introduites après partage amiable, voire après partage judiciaire. En effet, le tribunal rejettera très certainement l’action en recel de succession si elle est introduite après que les parties aient procédé au partage amiable des immeubles, des meubles et des liquidités dépendant des successions (voir notamment, récemment : Cass., Civ.1re, 6-11-2019, n°18-24.332).
Ainsi, l’action ayant pour objet de réparer le détournement d’héritage ou d’une partie de la succession doit être exercée dès l’ouverture des opérations de compte liquidation et partage de la succession.
L’Avocat en droit des successions que vous mandaterez pour introduire l’action vous conseillera par exemple de formuler les demandes relatives à un recel successoral en même temps que l’action en partage judiciaire.
A noter que l’action peut également avoir pour objet l’obtention d’une condamnation à des dommages et intérêts de la part du receleur.
6- Prescription des intérêts en cas de non rapport des sommes à la succession
Il s’agit du cas dans lequel un jugement est déjà intervenu pour condamner le receleur à rapporter les biens et sommes recelées.
Intérêts échus avant le 17 juin 2008
Conformément à la jurisprudence constante de la première chambre civile de la Cour de cassation, le créancier peut poursuivre pendant 30 ans le recouvrement des intérêts échus avant le 17 juin 2008.
Intérêts échus après le 17 juin 2008
Conformément à l’article 2222 du code civil, le créancier peut poursuivre l’exécution d’un jugement portant condamnation au paiement d’une somme d’argent pendant 10 ans (voir notamment CA Nancy, 09-02-2015, n° 14/00202).
7- Prescription de l’action devant une juridiction pénale
L’acte de recel successoral peut également être constitutif d’un délit pénal s’il s’accompagne d’un acte d’abus de faiblesse à l’égard du de cujus. Le délai de prescription en matière pénal pour une telle infraction est de 6 ans, conformément à l’article 8 du code de procédure pénale.
Pour toute question relative à une éventuelle prescription de l’action en recel successoral, n’hésitez pas à nous contacter via notre onglet « contact » ou directement à notre adresse mail contact@ebene-avocats.fr
Autres pages sur le recel de succession :
Preuve du détournement d’héritage ou recel successoral
5 éléments de la sanction civile du recel successoral