Demander sa quote-part dans les bénéfices de l’indivision

 

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Source image : Définition juridique

 

Demander sa quote-part dans les bénéfices de l’indivision est possible avant le partage définitif, c’est-à-dire avant de sortir définitivement de l’indivision à l’issue d’un partage amiable ou judiciaire. Il s’agit alors de solliciter le paiement provisionnel des sommes dues à l’indivisaire.

 

1- Qu’est-ce que la quote-part dans les bénéfices de l’indivision ?

Lorsqu’un bien est en indivision, les indivisaires disposent de droits sur les fruits et revenus qu’il génère. Conformément aux articles 815-10 et 815-11 du Code civil, tout indivisaire peut réclamer sa quote-part des bénéfices sous certaines conditions.

Les bénéfices d’un bien indivis représentent les revenus nets une fois déduites les charges, telles que les impôts fonciers, taxes, frais de gestion, ainsi que d’éventuelles provisions.

Chaque indivisaire peut choisir de laisser ces revenus dans la masse indivise ou demander une distribution proportionnelle à ses droits. La répartition repose sur l’acte de notoriété ou l’intitulé d’inventaire établi par un notaire.

2- Un indivisaire peut-il réclamer le paiement de sa quote-part dans les bénéfices de l’indivision ?

Conformément au mécanisme de l’indivision, chaque indivisaire se voit attribuer une quote-part dans l’indivision. Il peut ainsi réclamer sa part dans l’indivision correspondant à ladite quote-part.

Pour cela, encore faut-il que les comptes de l’indivision soient bénéficiaires et non déficitaires.

Les bénéfices de l’indivision peuvent être notamment constitués des éléments suivants :

Les déficits de l’indivision peuvent être notamment constitués des éléments suivants :

3- Comment demander sa part des bénéfices de l’indivision ?

3.1 Destinataire de la demande

La demande de perception des bénéfices doit être adressée à la personne en charge de la gestion du bien indivis. Cette gestion peut être confiée à un gérant désigné par un mandat écrit ou tacite.

3.2 Calcul et justification des bénéfices

La demande doit s’appuyer sur un compte annuel de gestion, qui présente les revenus nets de l’indivision. Ce document est essentiel pour vérifier que la distribution est possible et qu’elle respecte les règles de répartition.

3.3 Périodicité de la répartition

Par défaut, la périodicité de répartition des bénéfices est annuelle, débutant à la date anniversaire de l’ouverture de l’indivision. Toutefois, les indivisaires peuvent convenir d’une autre périodicité, comme l’année civile.

4- Cas dans lesquels la distribution peut être refusée

4.1 Absence de revenus suffisants

Si l’indivision ne génère pas suffisamment de revenus, aucune distribution ne peut être effectuée.

4.2 Indemnisation pour occupation

Un indivisaire occupant privativement un bien indivis peut être débiteur d’une indemnisation d’occupation. Si cette indemnisation couvre la totalité des bénéfices réclamés, la demande peut être refusée.

5- Recours en cas de litige sur la répartition des bénéfices

En cas de contestation, le président du tribunal judiciaire peut être saisi. Selon la procédure accélérée au fond, il peut ordonner une répartition provisionnelle des bénéfices sous réserve de l’établissement d’un compte définitif lors de la liquidation de l’indivision.

Le juge s’assure que l’indivision dispose de fonds suffisants avant toute décision.

6- Délais de prescription pour demander sa part des bénéfices

Le délai de prescription des demandes relatives aux fruits et revenus des biens indivis est de cinq ans à compter de la date où les bénéfices ont été perçus ou auraient pu l’être.

Ce délai peut être interrompu par des actions comme un procès-verbal de difficulté établi par un notaire, qui constate une réclamation sur les revenus.

7- Exemple de cas de jurisprudence récent

CA Versailles, 17-12-2020, n° 19/08107

Dans cette affaire récente,

« – sur la répartition provisionnelle des bénéfices sollicitée par les consorts B :

M. A B conteste le bien fondé de la demande de Mme Ad B visant à obtenir à titre provisionnel sa quote-part dans les bénéfices de l’indivision qui résulteraient du versement de l’indemnité d’occupation.

Il fait valoir que les intimés ne justifient pas que l’indivision disposerait de fonds liquides et immédiatement disponibles pour opérer un tel règlement, ni de l’absence d’éventuelles dépenses et charges qui seraient susceptibles de venir s’imputer sur lesdits bénéfices.

Il ajoute que l’octroi d’une avance sur les bénéfices de l’indivision relève du pouvoir d’appréciation du juge qui peut l’écarter au vu des circonstances propres à l’espèce.

A ce titre, M. A B expose que sa situation personnelle est actuellement particulièrement difficile dans la mesure où, âgé de 75 ans, il souffre depuis de longues années d’une altération de ses facultés physiques et psychiques caractéristique de la maladie d’Alzheimer, sa fille ayant entrepris les démarches qui n’ont pas encore abouti pour obtenir la mise en oeuvre d’une mesure de protection judiciaire le concernant.

L’appelant ajoute qu’en raison de son incapacité à gérer son quotidien, sa situation financière s’est fortement dégradée, avec de nombreux incidents de paiement et des procédures de saisie, ses ressources étant constituées d’une pension de retraite de 531,50 euros par mois et de revenus fonciers d’une moyenne mensuelle de 1 217,12 euros. Il ajoute ne détenir aucune épargne.

Mme Ad B soutient au contraire que l’immeuble génère des bénéfices compte tenu des loyers perçus au titre des autres appartements et des baux commerciaux, rappelant au vu du relevé de gestion qu’entre janvier et juillet 2019, les recettes de l’indivision se sont élevées à 51 958,96 euros.

Elle ajoute que M. A B ne démontre pas son état d’impécuniosité et rappelle qu’il a un patrimoine immobilier en tant que propriétaire indivisaire d’un quart de l’immeuble.

Elle s’estime donc bien fondée en sa qualité d’usufruitière à solliciter une avance sur les bénéfices de l’indivision au titre de l’indemnité d’occupation due par M. A B. Elle réclame le règlement directement par ce dernier en fonction du montant de l’indemnité finalement retenue d’une somme de 14 000 euros ou à titre subsidiaire de 9 360 euros.

Sur ce,

L’article 815-10 (…).

L’article 815-11 (…).

Ainsi s’il peut être octroyé à l’un des indivisaires une avance provisionnelle sur le revenu que constitue l’indemnité d’occupation due par un coïndivisaire, encore faut-il que soit démontrée l’existence de bénéfices pour l’indivision après déduction des charges et dépenses.

Il sera également rappelé que l’octroi d’une provision ne constitue qu’une faculté pour le juge.

En l’espèce, pour justifier de l’existence de bénéfices, Mme B produit les compte-rendus de gestion de l’indivision pour les mois de janvier à juillet 2019.

Le dernier relevé pour le mois de juillet 2019 mentionnait l’existence de recettes à hauteur d’un montant de 9 048,09 euros, après déduction des dépenses.

Or, eu égard à leur ancienneté, ces seules pièces sont insuffisantes à établir l’existence encore à ce jour de bénéfices pour l’indivision, même après versement par M. A B de l’indemnité d’occupation pour une somme globale de 37 440 euros.

Il sera notamment observé que les travaux de rénovation de l’appartement précédemment occupé par M. A B sont susceptibles de s’élever suivant le devis de juin 2019 versé aux débats à un montant de 52 071,03 euros, ce devis qui porte sur la réfection de l’appartement situé au 4ème étage droit ne concernant nullement comme le prétendent les intimés l’appartement de M. Am et de Mme An qui se situe au 4ème étage gauche.

Or, il n’est donné aucune précision quant au lancement et l’état d’avancement de ces travaux qui vont à l’évidence obérer la situation financière de l’indivision.

Au regard de l’ensemble de ces éléments et plus particulièrement de l’incertitude quant à l’existence de bénéfices de l’indivision, Mme Ad B sera déboutée de sa demande de paiement d’une avance provisionnelle. L’ordonnance sera infirmée sur ce point. »

 

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