Le droit viager au logement sur la résidence principale du conjoint survivant et le code civil

 

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Source image : Droit & Successions

 

Le conjoint survivant dispose d’un véritable droit viager au logement sur la résidence principale du conjoint survivant selon les dispositions du code civil. On parle également de droit viager d’habitation, comparable à celui d’un usufruitier.

 

1- Le droit viager au logement sur la résidence principale du conjoint survivant

Le conjoint survivant dispose d’un droit viager au logement sur la résidence principale du défunt, dans le cas où le conjoint survivant vivait avec le défunt au moment du décès du de cujus. Ce droit viager d’habitation lui permet soit de vivre au sein du logement, jusqu’à son décès, soit de mettre en location le dit logement, qu’il s’agisse d’une maison ou d’un appartement, et d’en percevoir les loyers jusqu’à son décès.

Le droit viager au logement sur la résidence principale du conjoint est comparable à celui d’un usufruitier. On parle en ce sens « d’usufruit restreint ». Pour en savoir plus : qu’est-ce que l’usufruit ?

Attention : pour pouvoir en bénéficier, le conjoint survivant doit clairement manifester sa volonté de bénéficier de son droit viager au logement, en écrivant par exemple un courrier au notaire et aux cohéritiers.

2- Le conjoint survivant ne peut s’opposer à la vente de la nue-propriété de la résidence principale

Comme évoqué ci-dessus, le droit viager au logement est comparable au droit d’un usufruitier. Il s’agit donc en quelque sorte d’un démembrement du droit de propriété. Les autres héritiers, s’ils existent, ont donc eux aussi un droit sur la résidence principale conjoint survivant, mais il s’agit d’un droit de nature différente : ils sont titulaires d’une quote-part indivise sur la nue-propriété du bien. Ainsi, en tant que nue-propriétaire, ils ont la possibilité de vendre leur quote-part indivise en tant que nue-propriétaire. Le conjoint survivant ne peut arguer de son droit viager d’occupation pour s’opposer à cette vente. Seulement, même en cas de vente de la nue-propriété du bien, son droit viager demeure. Ainsi, la vente de la nue-propriété de la résidence principale du défunt ne fait pas obstacle au droit viager du conjoint survivant.

Exemple : CA Paris, 3, 1, 07-04-2021, n° 18/16724

« 2°) Sur la demande relative au partage judiciaire de la succession de … :

Mesdames Nathalie … et Ingrid … reprochent au jugement entrepris d’avoir considéré que le fait que Madame A veuve … ait déclaré, selon l’acte de notoriété dressé par le notaire précité, qu’elle entendait bénéficier des droits viagers d’habitation et d’usage sur son habitation principale et sur le mobilier garnissant celle-ci conformément à l’article 764 du code civil, entraînait une « hétérogénéité des droits en cause », faisant cesser toute indivision et interdisait tout partage. Elles soutiennent qu’il résulte des pièces versées aux débats que Maurice … détenait en indivision avec Madame Aa A veuve … la propriété des biens et droits immobiliers consistant en une maison sur un terrain sis 3 bis rue Saint Leu à Périgny-sur-Yerres, et soulignent que la quote-part indivise du défunt concernant ces biens et droits immobiliers est mentionnée au projet de déclaration de succession établi par Maître …. Elles ajoutent que « tout au plus, y a-t-il lieu de considérer en bonne logique, que la propriété indivise de l’ensemble immobilier composé de la maison et du terrain dont s’agit, se trouve-t-elle désormais grevée du droit viager en cause par la mise en œuvre de l’option qui lui est réservée en vertu du texte précité ».

En réponse, Madame Aa A veuve … fait valoir qu’il est constant qu’elle a sur le pavillon jusqu’à son décès un droit d’habitation et un droit sur le mobilier le garnissant. Elle ajoute que « les parties en présence ne sont pas indivisaires en ce qui concerne la maison et le mobilier mais dans le cadre du démembrement du droit de propriété sur le pavillon lié à l’exercice de ce droit d’usage et d’habitation », de sorte qu’elle considère que les dispositions de l’article 815 du code civil relative au régime de l’indivision ne sont pas applicables en l’espèce.

Aux termes des dispositions de l’article 764 du code civil, (…) ».

Il s’ensuit que ces dispositions protègent le conjoint survivant en lui assurant le maintien dans son cadre de vie de façon temporaire ou viagère.

Les droits d’usage et d’habitation, démembrement du droit de propriété, constituent un usufruit restreint, au sens des dispositions de l’article 625 du code civil selon lesquelles « Les droits d’usage et d’habitation s’établissent et se perdent de la même manière que l’usufruit ».

Par ailleurs, aux termes des dispositions de l’article 815 du code civil, (…) ».

Aux termes des dispositions de l’alinéa 2 de l’article 815-5 du même code, « Le juge ne peut, à la demande d’un nu-propriétaire, ordonner la vente de la pleine propriété d’un bien grevé d’usufruit contre la volonté de l’usufruitier ».

Aux termes des dispositions de l’article 817 du code civil, « … ».

Aux termes des dispositions de l’article 818 du même code, « … ».

Aux termes des dispositions de l’article 819 du même code, « …».

En l’espèce, Madame Aa A veuve … qui est propriétaire à hauteur des 5/31èmes de l’ensemble immobilier situé à Périgny-sur-Yerres où elle résidait avec le défunt, a manifesté de façon non équivoque et dans le délai imparti par les dispositions précitées, la volonté d’user des droits viagers d’habitation et d’usage comme cela résulte de sa lettre du 28 novembre 2009 adressée au notaire en charge du règlement de la succession et selon l’acte de notoriété établi par ce dernier le 2 décembre 2009, et par voie de conséquence d’accepter la succession du de cujus, de sorte que les droits viagers d’habitation et d’usage sur ce bien et le mobilier le garnissant lui sont reconnus, ce qui n’est pas contesté aux termes des écritures respectives des parties.

Comme indiqué à l’acte de notoriété susvisé, Madame Aa A veuve … recueille également en application des dispositions de l’article 757 du code civil, la propriété du quart des biens de Maurice … en présence d’un ou plusieurs enfants de l’époux prédécédé qui ne sont pas issus des deux époux.

Si Madame Aa A veuve … est ainsi titulaire de droits réels de nature différente sur l’ensemble immobilier objet du litige, il n’en demeure pas moins compte tenu de ces droits et de l’absence de pleine propriété de Mesdames Nathalie … et Ingrid … que les parties sont en indivision sur leurs droits de même nature sur ce bien, soit la nue-propriété de l’ensemble immobilier de Périgny-sur-Yerres.

Mesdames Nathalie … et Ingrid … sont donc fondées à solliciter le partage de l’indivision de la nue-propriété existant sur le bien objet du litige.

En conséquence, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a exclu du partage judiciaire de la succession de Maurice … les biens situés …, grevés du droit viager légal d’habitation et d’usage au profit de Madame A veuve … et il sera dit que le partage judiciaire de la succession de Maurice … comprendra sa part de la nue-propriété indivise des biens précités.

3°)_Sur la demande relative à la licitation des biens immobiliers situés 3 rue Saint leu à Périgny-sur-Yerres :

Mesdames Nathalie … et Ingrid … soutiennent qu’elles sont fondées en leur qualité d’indivisaires et conformément à l’article 815 du code civil, à solliciter la vente du pavillon indivis, bien que grevé du droit de jouissance viager au profit de l’intimée, « le caractère indivis du pavillon et du terrain étant d’évidence non susceptible de partage en nature entre les trois indivisaires ».

En réponse, Madame Aa A veuve … fait valoir, se fondant sur les dispositions de l’article 764 du code civil, que le partage de la maison et du mobilier le garnissant ne peut être ordonné judiciairement. Rappelant être titulaire du droit viager, elle indique être opposée à la licitation. Elle ajoute que souhaitant acquérir la propriété du bien immobilier, elle a fait « moultes propositions » en ce sens. Elle estime que le partage de la succession de Maurice … doit forcément exclure le bien grevé du droit viager d’occupation.

Aux termes des dispositions de l’article 1377 du code de procédure civile, (…) »

Il résulte des développements plus avant que les parties sont bien en indivision sur la nue-propriété de l’ensemble immobilier de Périgny-sur-Yerres.

Mesdames Nathalie … et Ingrid … sollicitent d’ailleurs la vente sur licitation de la seule « nue-propriété ou de la nue-propriété du bien indivis grevé du droit d’habitation » conformément donc aux dispositions précitées de l’article 818 du code civil.

En vertu des dispositions du second alinéa de l’article 815-5 du code civil, et par analogie avec l’usufruit, les droits d’habitation et d’usage ne se perdent en effet qu’avec l’accord de son titulaire, et ne s’éteignent, lorsqu’ils sont viagers, qu’au décès de celui-ci ou par consolidation si le conjoint survivant acquiert le bien ou se le voit attribuer dans le partage successoral, de sorte que les droits viagers d’habitation et d’usage ne sont pas affectés par la licitation.

Madame Aa A veuve …, propriétaire des 5/31èmes du bien précité, est titulaire sur les 26/31èmes restant qui figurent à la succession de Maurice … des droits viagers d’habitation et d’usage pour lesquels elle a opté et auxquels elle n’a à ce jour pas renoncé.

Dans ces conditions, la licitation peut intervenir en l’espèce entre Mesdames Nathalie … et Ingrid … d’une part, sur leur part indivise de l’ensemble immobilier de Périgny-sur-Yerres figurant à la succession de Maurice …, et Madame Annie … sur sa propre part indivise, qu’à hauteur de la nue-propriété du bien considéré, grevés des droits viagers d’habitation et d’usage au profit de Madame Aa A veuve Af. »

 

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