Le rapport de l’assurance-vie à la succession

 

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Source image : Droit & Successions

 

Par principe, le rapport de l’assurance vie à la succession ne doit pas être effectué car le capital et les primes versées ne sont pas compris dans la messe à partager. Dans des cas exceptionnels, ces sommes pourront être toutefois réintégrées dans l’héritage.

1- Principe : le capital et les primes versées au titre d’un contrat d’assurance-vie ne sont pas rapportables à la succession

Le principe en matière d’assurance vie et succession est prévu à l’article L.132-13 du code des assurances. Ce texte prévoit que le capital ou la rente qui est versé au bénéficiaire d’un contrat d’assurance vie lors du décès du contractant n’est pas en principe compris dans l’actif successoral. Ainsi, le capital qui sera versé au bénéficiaire de l’assurance vie ne sera pas compris dans la masse à partager, même si ledit bénéficiaire est un héritier réservataire ou non réservataire, enfant, petit-enfant, neveu, nièce, conjoint survivant, ou personne tierce et non appelée à participer à l’héritage du défunt.

2- Exception : en cas de caractère exagéré des primes

Le principe du non rapport de l’assurance vie à la succession est atténué par un cas particulier : celui dans lequel le montant des primes versées par le de cujus du temps de son vivant était manifestement exagéré par rapport à ses capacités financières. En ce dernier cas, les autres héritiers pourront exiger la réintégration à la succession de l’assurance vie.

En cas de contentieux successoral, le rôle de l’Avocat en droit des successions sera alors de démontrer le caractère exagéré ou non exagéré des primes versées.

Exemple : CA Rennes, 20-04-2021, n° 19/02363

« 2) Sur la demande de rapport à la succession du capital des contrats d’assurance vie

Mme A épouse Ab demande à la cour d’ordonner le rapport à la succession de Aj Ak des capitaux placés sur ses deux contrats d’assurance vie Ecureuil projet n° 940712779 et Initiatives transmission n° 405562116, souscrits auprès de la Caisse d’épargne, en se fondant sur les dispositions de l’article L132-13 alinéa 2 du code des assurances.

L’article L132-13 du code des assurances dispose : «(…)»

La cour doit donc apprécier si les primes versées sur le contrat d’assurance vie, et non le montant du capital au décès, car il comprend les primes et les intérêts, étaient manifestement exagérées eu égard aux facultés de Aj Ak.

Aj Ak avait ouvert deux contrats d’assurance vie à la Caisse d’épargne, comme son époux.

Le contrat Ecureuil projet (n° 940712779) ouvert le 12 septembre 1995 était créditeur de 4805,72 euros au jour de son décès. Le contrat Initiative transmission ouvert le 23 septembre 1997 était créditeur de 228 630,36 euros au jour de son décès.

Après le décès de son époux en 2004 et la vente du domicile familial, son tuteur a reçu des fonds qu’il a placés, avec l’autorisation du juge des tutelles, sur le contrat d’assurance vie Initiative transmission. Il a ainsi versé sur ce contrat, courant 2004, la somme de 43 193,51 euros puis celle de 108 110,87 euros.

Au 31 décembre 2004, le solde du contrat d’assurance vie Ecureuil projet était de 7599,98 euros et le solde du contrat d’assurance vie Initiative transmission était de 173 290,84 euros. Aucun autre versement n’a été fait ensuite et la différence positive entre le solde des contrats en 2004 et au jour du décès de Aj Ak résulte du versement des intérêts.

Il y a lieu de relever qu’au 31 décembre 2004 Aj Ak disposait de liquidités sur des comptes courants et des livrets d’épargne pour un montant total de 49 737,48 euros. Il y a lieu également de relever qu’avant son décès une partie du solde du contrat d’assurance vie Ecureuil projet a été rachetée, le solde du contrat à son décès étant d’un montant inférieur au solde du contrat au 31 décembre 2004 (moins 2794,26 euros).

A compter du 9 février 2004, Aj Ak est entrée à l’EHPAD de Guéméné-sur-Scorff.

Son budget était équilibré ainsi qu’il ressort des comptes de gestion des années 2004 et 2016, ses revenus (pensions de retraite et de réversion) étant supérieurs au coût de sa prise en charge par l’EHPAD.

Mme Ak était âgée de 82 ans en 2004 quand elle a perçu les fonds provenant de la succession de son époux et de la vente de leur maison.

Elle n’avait pas besoin, pour couvrir ses frais, de davantage de fonds que ceux servis par les caisses de retraite et ceux produits par ses livrets d’épargne. Elle disposait en outre, sur ces livrets, d’une épargne disponible à tout moment d’un montant important, eu égard à ses besoins. Une autre partie de son épargne était placée sur ses deux contrats d’assurance vie, ouverts de longue date. Son budget a même permis à son tuteur, chaque année, de verser des étrennes et un chèque d’anniversaire d’un montant conséquent aux trois petits-enfants de Aj Ak, comme leurs grands-parents le faisaient eux-mêmes avant 2004.

C’est donc de façon justifiée et cohérente, afin de faire bénéficier la majeure protégée de tous les avantages, notamment fiscaux, du point de vue du souscripteur, et d’un taux de rémunération attractif que son tuteur a placé la somme totale de 150 000 euros environ sur un des contrats d’assurance vie. Les courriers du tuteur des 21 octobre et 16 novembre 2004 adressés au juge des tutelles de Lorient expliquent clairement les motifs du choix de ce placement.

A tout moment, par ailleurs, et en cas de besoin, des rachats auraient pu être faits sur le contrat d’assurance vie Initiative transmission, comme cela a été le cas sur le contrat Ecureuil projet.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, l’utilité économique du placement des fonds reçus par Aj Ak en 2004 sur un de ses contrats d’assurance vie est établie.

Le montant des sommes versées n’est pas manifestement exagéré eu égard à ses facultés en 2004 et à ses conditions de vie et il n’y a pas lieu à rapport à l’actif de la succession comme le demande Mme A épouse Ab.

Le jugement sera donc confirmé pour avoir rejeté sa demande à ce titre. »

Pour tout litige autour de l’assurance-vie et d’une succession, faites appel à un Avocat expert en droit des successions.

 

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