Succession et liquidation judiciaire d’un héritier
Lorsqu’une liquidation judiciaire a été ouverte à l’encontre d’un héritier, l’héritier en cause est totalement dessaisi, et le liquidateur judiciaire nommé par le tribunal exerce alors les droits et actions du débiteur dans la succession. Celui-ci peut par exemple assigner ses cohéritiers en partage.
Le cas qui fait l’objet de la présente page est un cas particulier dans lequel une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte contre un héritier.
Source image : Nioumark Avocats
1- Rappel sur les pouvoirs du liquidateur judiciaire
La liquidation judiciaire est une procédure collective (auparavant appelée procédure de « faillite ») qui prévoit des règles applicables lorsqu’une personne morale ou physique se trouve en état de cessation des paiements, notamment s’agissant du désintéressement des créanciers.
En cas de liquidation judiciaire d’une personne physique, cette personne est en principe totalement dessaisi de ses pouvoir au bénéfice d’une personne nommée par le tribunal, appelée « liquidateur judiciaire » chargé de « gérer ses biens » et de régler ses créances conformément aux dispositions prévues par le code de commerce.
2- Liquidation judiciaire d’un héritier : le liquidateur judiciaire exerce les droits de l’héritier dans le cadre de la succession
Lorsqu’une succession est ouverte et que la personne placée sous liquidation judiciaire est héritière (héritier réservataire ou non réservataire), c’est au liquidateur judiciaire d’exercer ses droits et actions dans la succession.
Ainsi, en cas d’indivision successorale, le liquidateur judiciaire peut par exemple assigner les autres héritiers en partage judiciaire.
Exemple : CA Versailles, 05-11-2020, n° 19/01813
« MOTIFS DE LA DÉCISION :
Attendu que l’appelant demande à la cour de le déclarer recevable à présenter des contestations, nonobstant les dispositions de l’article L 641-9 du code de commerce, dès lors qu’il entend faire valoir un droit extra-patrimonial en sa qualité d’héritier de Madame B avec laquelle il a conclu un pacte civil de solidarité (PACS) douze jours avant son décès, soit le 15 mars 2012, et qui l’a institué légataire universel selon testament olographe du même jour ;
Qu’il soutient que le bien en cause a été acquis en indivision avec Madame B, qu’il dispose de la faculté d’accepter ou non sa succession, s’agissant d’un droit extra-patrimonial « hors contrôle » du liquidateur judiciaire, et que « tant que cette faculté n’a pas été exercée, le liquidateur ne pouvait requérir la vente sur licitation, quand bien même il dispose d’une autorisation formelle pour ce faire » ; qu’il estime, de plus, qu’il est de l’intérêt des créanciers d’attendre qu’il ait accepté la succession afin de pouvoir percevoir, non point seulement sa propre part dans l’indivision, mais aussi les sommes lui revenant en qualité d’héritier ; qu’il ajoute qu’il serait prêt à affecter le montant d’un contrat d’assurance-vie dont il bénéficie au désintéressement des créanciers afin de demeurer, actuellement victime d’une santé déficiente, dans le bien en cause qui constitue son lieu d’habitation ;
Mais attendu que le liquidateur qui exerce les droits et actions du débiteur dessaisi en application de l’article 641-9 du code de commerce (dans sa rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005) peut agir sur le fondement de l’article 815 du code civil qui dispose que nul n’est contraint de rester dans l’indivision ; que c’est d’ailleurs ainsi qu’en a jugé la cour d’appel de Versailles dans l’arrêt sus-visé dont il est établi qu’il est définitif, Monsieur A n’étant pas recevable à remettre en cause la force de chose jugée ;
Qu’il l’est d’autant moins qu’il ne peut se prévaloir ni d’un intérêt ni d’une qualité à agir ;
Qu’en effet et s’agissant de son intérêt à agir, il y a lieu de relever que s’il demande à la cour de le juger recevable en sa contestation et de juger que le premier juge « ne pouvait pas autoriser » la vente forcée, il n’en tire aucune conséquence juridique, se bornant à réclamer des « dire et juger » dans le dispositif de ses conclusions saisissant la cour ; qu’en outre, ce n’est pas le juge de l’exécution qui a autorisé la vente forcée mais le tribunal de grande instance de Versailles dont le jugement a été confirmé par la cour ; que force est enfin de considérer que le bien a été vendu sur surenchère le 10 avril 2019 au prix de 141.000 euros et que l’état des créances admises s’élève à environ 200.000 euros, selon les conclusions non contestées sur ce point de la Selar] SMJ intimée ;
Que, s’agissant de sa qualité à agir, il est vrai qu’il produit le testament olographe dont il se prévaut comportant deux lignes manuscrites, une date et une signature ; qu’il n’en demeure pas moins qu’à s’en tenir au septième rapport de diligences de la succession de Madame Ab B versé par l’appelant aux débats, la qualité d’héritier qu’il revendique au moyen de ce seul document, 8 ans après le décès de Madame B, ne peut-être tenue que pour hypothétique, Madame X exposant dans ce rapport qu’elle ne dispose ni d’un acte de notoriété, ni d’une attestation dévolutive ni d’un livret de famille et Monsieur A affirmant lui-même qu’il n’a pas accepté la succession ;
Qu’il convient, par conséquent, de confirmer le jugement qui l’a déclaré irrecevable en sa contestation ;
(…) »
Quid en cas redressement judiciaire d’un héritier dans une succession ?
En cas d’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire à l’encontre d’un héritier, des éventuelles restrictions au pouvoir de cet héritier pourront être prévus par le jugement d’ouverture du redressement judiciaire. Ainsi, si le jugement d’ouverture prévoit que l’héritier est dessaisi, ce sera à l’administrateur judiciaire nommé d’exercer les droits de l’héritier dans la succession.